. Poche: 192 pages
- Editeur : 10 X 18 (3 janvier 2002)
Coincé entre une progéniture ingrate et un talent de plus en plus incertain, le personnage principal de Mon chien stupide oscille entre un cynisme salvateur et des envies de fuite.
Fils d'immigrés italiens, il caresse le rêve d'un retour à ses racines, fantasmant sur une vie paisible aux terrasses des cafés de la Piazza Navona à Rome.
Mais pour l'heure, il faut courir le cachet, écrire des scénarios médiocres pour des séries télé affligeantes... ou le plus souvent aller encaisser un chèque des allocations de chômage. L'existence tumultueuse de la famille est bouleversée lorsqu'un gigantesque chien décide de s'installer dans la maison, pour le plus grand bonheur de l'auteur raté mais au grand dam du reste de sa tribu.
Mon chien Stupide est une tragi-comédie de la crise individuelle : crises d'adolescence à retardement, démon de midi, couple en déliquescence. John Fante signe ici un roman touchant, débordant de compassion et d'acide lucidité.
Fils d'immigrés italiens, il caresse le rêve d'un retour à ses racines, fantasmant sur une vie paisible aux terrasses des cafés de la Piazza Navona à Rome.
Mais pour l'heure, il faut courir le cachet, écrire des scénarios médiocres pour des séries télé affligeantes... ou le plus souvent aller encaisser un chèque des allocations de chômage. L'existence tumultueuse de la famille est bouleversée lorsqu'un gigantesque chien décide de s'installer dans la maison, pour le plus grand bonheur de l'auteur raté mais au grand dam du reste de sa tribu.
Mon chien Stupide est une tragi-comédie de la crise individuelle : crises d'adolescence à retardement, démon de midi, couple en déliquescence. John Fante signe ici un roman touchant, débordant de compassion et d'acide lucidité.
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Revue de presse : bibliobs : John Fante, ce génie incompris
Il y a trente ans, John Fante mourrait des suites de son diabète, le 8 mai 1983 à Los Angeles, dans l’indifférence la plus totale. Pourtant les Etats-Unis et le monde entier venait de perdre un immense écrivain. Il venait de terminer quelques mois plus tôt son dernier roman, «Rêves de Bunker Hill».
L’histoire de Fante c’est celle des Etats-Unis au XXe siècle, ses excès, ses passions, le rêve américain tant promis aux immigrés mais jamais achevé, d’Hollywood. C’est aussi l’histoire d’un écrivain génial (et persuadé lui-même d’être le plus grand de tous), reconnu sur le tard pour ses romans et qui a toujours voulu approcher de la «moelle de la vie», quitte à se détruire lui et sa famille…
Un jour j’ai sorti un livre et c’était ça. Je restai planté un moment, lisant et comme un homme qui a trouvé de l’or à la décharge publique. J’ai posé le livre sur la table, les phrases filaient facilement à travers les pages comme un courant. Chaque ligne avait son énergie et était suivie d’une semblable et la vraie substance de chaque donnait sa force à la page, une sensation de quelque chose sculpté dans le texte. Voilà enfin un homme qui n’avait pas peur de l’émotion. L’humour et la douleur mélangés avec une superbe simplicité.
Le début du livre était un gigantesque miracle pour moi. J’avais une carte de la Bibliothèque. Je sortis le livre et l’emportai dans ma chambre. Je me couchai sur mon lit et le lus. Et je compris bien avant de le terminer qu’il y avait là un homme qui avait changé l’écriture. Le livre était ‘‘Demande à la poussière’’ et l’auteur, John Fante. Il allait toute ma vie m’influencer dans mon travail. Je terminai ‘‘Demande à la poussière’’ et cherchai d’autres Fante à la bibliothèque. J’en trouvai ‘‘le Vin de la jeunesse’’ et ‘‘Bandini’’. Ils étaient du même calibre, écrits avec les tripes et le cœur.»
"Radio Bandini"
Ces mots sont de Charles Bukowski l’un des plus grands auteurs américains du XXe siècle et aussi l’homme qui a fait redécouvrir son modèle John Fante. Sa description évoque Arthur qui découvrirait le Graal, et pour cause. Lire Fante, c’est faire l’expérience unique de pénétrer au plus profond de l’âme d’un homme, dans toute sa complexité, ses contradictions, ses humiliations, ses fantasmes. Pour Brice Matthieussent qui a traduit la plupart de ses œuvres, «c’est écouter Radio Bandini ou Radio Molise. Il se fait le porte-parole de ces voix secrètes qui le hantaient.»
Car John Fante n’a jamais raconté qu’une seule histoire, la sienne. Il ne dépeint pas de grande fresque sociétale comme ont pu le faire Steinbeck ou Faulkner. Les œuvres de Fante sont d’une grande sensibilité qui peigne les humiliations, les revanches et les malentendus qui empoisonnent les rapports les plus intimes entre les êtres.
Son personnage est un rêveur bourré d’ambition et de contradictions. Et la force des récits de Fante, explique encore Matthieussent, réside dans ce savoureux mélange «d’humour et de désespérance. Qu’il s’agisse de Bandini ou de Molise, tous les deux ont une énergie folle, une rage même, mais c’est une énergie du désespoir qui se transforme parfois en ironie cynique et terriblement drôle.»
"A l’Ouest de Rome"
Les premières œuvres de Fante sont marquées par son désir d’intégration. Lui, le fils de maçon des Abruzzes qui veut devenir le plus grand auteur américain de sa génération, a souffert durant son enfance de la discrimination: celle que subissaient les immigrés de la part des «WASP» (White Anglo-Saxon Protestant), ces populations qui ont fondé le mythe américain et façonné ce pays qu’admirait tant John Fante, mais qui le rejetaient, puisqu’il n’était qu’un autre, catholique et italien. Un paysan sous-éduqué, avide d’alcool et de femmes.
Pourtant, une fois qu’il intègre la société bourgeoise et «people» d’Hollywood, Fante ne cessera de chercher à se rapprocher de «son» Italie. Selon Matthieussent, «Fante vit à l’ouest de Rome entre une Italie fantasmée par les souvenirs familiaux et une Amérique qui le refuse.»
«Quand il était jeune homme, mon père a trouvé aux Etats-Unis un grand préjudice envers la communauté Italienne», dit de son côté son fils Dan Fante. Près d’un siècle après l’écriture de ses premiers romans, ce sujet-là est terriblement contemporain: s’assimiler ou rester un «italien», se cloîtrer dans sa communauté. Mais le vrai désir de John Fante était bien de marquer l’histoire de la littérature américaine et de «faire la nique» à ces WASP qui l’ont tant méprisé. Montrer que lui, le fils d’immigré italien, était un génie.
Sa carrière ne sera en rien comparable à celles d’un Hemingway, d’un Steinbeck ou même d’un Bukowski. Mais il restera persuadé toute sa vie de son propre génie. Dan Fante raconte même que «si on lui demandait qui était le plus grand auteur américain du XXe siècle, il répondait immédiatement John Fante.»
L’Orgie
La carrière de Fante démarra après qu’il se fut installé à Los Angeles en 1929. Il passait son temps entre les bibliothèques et des petits boulots. En 1932, il est enfin publié dans la revue «the American Mercury», que dirige alors le célèbre rédacteur en chef H.L Mencken. Fante lui vouera une admiration sans limite et entretiendra avec lui une relation épistolaire de plus de vingt ans.
En 1936, son premier roman, «la Route de Los Angeles», est refusé parce qu’il est «trop cru et trop provocant pour l’époque» selon Brice Matthieussent (Il sera finalement publié en 1985). Son premier roman publié n’est donc autre que «Bandini», en 1938. Il publie ensuite «Demande à la poussière» dans la foulée en 1939, mais ne connaît le succès qu’avec «Pleins de vie», publié en 1952.
C’est son seul et unique succès commercial. Mais il bouleverse sa vie. Fante a entre-temps épousé sa femme Joyce, une riche éditrice, avec laquelle il aura quatre enfants. Le succès de «Pleins de vie» et l’argent de sa femme lui permettent de se jeter corps et âme dans ses deux passions, le golf et le jeu. Il obtient une certaine reconnaissance des milieux littéraires et intègre Hollywood. Il y fait carrière pendant près de trente ans, une carrière purement «alimentaire» selon Brice Matthieussent. Dan Fante confirme:
Il détestait écrire des films et encore plus fréquenter les gens du cinéma, mais ça lui a permis de jouer au golf autant qu’il le voulait.»
Fante était un jouisseur il voulait vivre ses passions ad-nauseum quitte à délaisser sa famille, à qui il préférait le jeu, le golf, les femmes et l’écriture. Son fils Dan est bien placé pour le dire: «Mon père était plus disposé à élever des poules que des enfants». Ses multiples excès provoquaient le chaos dans sa vie personnelle et le rendaient profondément difficile à vivre. Son fils l’explique encore:
Non, c’était facile de vivre avec lui. La seule chose importante était de ne pas être dans la même pièce que lui.»
Ses romans tombèrent dans l’oubli jusqu’au jour où Bukowski, avec l’aide de son ami éditeur John Martin de Black Sparrow Press, voulut faire redécouvrir John Fante et notamment «Demande à la poussière». Mais Fante était alors en fin de vie. A la suite de complications de son diabète, il était devenu aveugle et cul de jatte.
Mais il publiera un dernier roman avant de mourir, «Rêves de Bunker Hil», le dernier du cycle Bandini, qui raconte ses débuts hollywoodiens. Toujours avec le même style, la même force dans le verbe malgré sa santé déclinante. Un roman qu’il n’a pas écrit directement, mais qu’il a dicté à sa femme et fidèle admiratrice de Joyce avant de mourir, à 74 ans, à Los Angeles. «Une œuvre, plus mélancolique, plus solitaire mais avec un Bandini toujours aussi ambitieux» selon Matthieussent.
Aux Etats-Unis, John Fante n’est toujours pas reconnu comme un des grands auteurs américains du XXe. Il est simplement un cas typique d’immigré italien, une idée qui l’aurait certainement autant fait rire qu’enrager. Son talent est plus reconnu en France et en Italie. Son œuvre connaît un regain d’intérêt certain, car les sujets abordés et son phrasé «nerveux, rapide, sec» comme dit Matthieussent, font de lui un auteur terriblement contemporain.
Après être passé par l’alcoolisme, son fils Dan est à son tour devenu écrivain et a obtenu de bonnes critiques pour son dernier roman, «Limousine blanche et blondes platines». Malgré une enfance pas toujours simple avec un père pareil, il estime que c’est bien «le plus grand écrivain américain du XXe siècle». Lors de sa rencontre avec Charles Bukowski, John Fante, alors en toute fin de vie, lui avait dit:
La pire chose qui puisse arriver aux gens c’est l’amertume. Ils deviennent tous si amers».
.Thomas Vercelot
(étudiant en journalisme à l'ISCPA Paris)