Il est, avec José Saramago, à l'origine du Parlement européen des écrivains (European Writers' Parliament) qui s'est tenu à Istanbul en novembre 2010.
L'auteur se décrit comme une personne de culture musulmane, engagée au service des droits de l'homme, de la liberté d'expression et
du dialogue entre les peuples et qui associe la religion à une
identification culturelle et historique sans avoir toutefois de
connexions personnelles avec Dieu.
Il est le premier écrivain du monde musulman à condamner publiquement la fatwaislamique lancée contre Salman Rushdie en 1989. Il reconnaît également dans la presse en 2005 la culpabilité de la Turquie dans les massacres kurdes et le génocide arménien ce qui lui vaut des menaces de mort et une assignation à comparaître devant les tribunaux.
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lecture d'octobre 2014
Cevdet Bey et ses fils,768 pages, excellent
[2014], trad. du turc par Valérie Gay-Aksoy, Paris, Gallimard,
C’est dans le quartier occidental de Nişantaşi que Cevdet Bey, un riche marchand musulman, s’installe avec son épouse pour fonder une famille.
Nous sommes en 1905 et le sultan Abdülhamid II vient
d’échapper à un attentat. Les élites turques contestent de plus en plus
fortement le règne despotique des dirigeants ottomans, le pays se
trouve alors à un tournant historique que Cevdet a pour projet de
relater dans ses Mémoires. Trente ans plus tard, la Turquie n’est
en effet plus la même après la réforme du régime politique, le
bouleversement des mœurs, et la mise en place d’un nouvel alphabet.
Les fils de Cevdet Bey en profitent pour prendre des directions différentes dans ce pays gagné par la modernité.
Et c’est à la troisième génération, en 1970, qu’un besoin de retour vers les origines vient sceller cette fresque turque. Ahmet, qui
est artiste-peintre, s’attaque au portrait de son grand-père, mort dans
les années soixante, et ainsi à celui de toute une nation...
Cevdet Bey et ses fils est le premier roman écrit par Orhan
Pamuk. Toute son œuvre affleure déjà dans cette immense fresque à trois
temps qui dépeint magistralement l’émergence d'une Turquie moderne,
thème qu’il déclinera sans cesse dans la suite de sa production
littéraire.
Son premier roman Cevdet Bey et ses fils, qui se veut une fresque généalogique dans la lignée des Buddenbrooks de Thomas Mann,
traite de l'évolution d'une famille sur trois générations et de
l'abandon par celle-ci d'un style de vie turc traditionnel pour un
modèle plus occidentalisé. L'œuvre brosse le portrait de Cevdet Bey, premier commerçant musulman de Constantinople qui s'oppose en 1905 au monopole des minorités arménienne, grecque et juive sur les activités commerciales ottomanes. D'inspiration réaliste, ce roman n'est pas encore caractérisé par le cheminement ésotérique des textes postérieurs de l'auteur. Cependant, il pose déjà les thèmes du double et de l'art, centraux dans sa production romanesque. Ce double motif se retrouve dans l'évocation de la vie d'Ahmet, le petit-fils de Cevdet. Ce peintre solitaire, en rupture avec le tumulte politique turc des années 1970, tente d'exécuter le portrait de son grand-père en renouant ainsi la chaîne du temps.
La Maison du silence[1988], trad. du turc par Münevver Andaç, 408 pages, 140 × 205 mm.Un
tout petit port turc, désert l'hiver, envahi par les touristes l'été. À
l'écart des luxueuses villas des nouveaux riches, une maison tombant en
ruine. Un nain y veille sur une très vieille femme, qui passe ses jours
et ses nuits à évoquer sa jeunesse et à ressasser ses griefs. Ils
vivent côte à côte dans le silence sur les secrets qu'ils partagent,
dans la haine et la solitude. Comme chaque été, les trois petits-enfants
de la vieille dame viennent passer quelques jours chez elle : un
intellectuel désabusé et alcoolique, une étudiante progressiste et
idéaliste, un lycéen arriviste, rêvant de la réussite à l'américaine.
Leur séjour sera bref et se terminera par un drame, causé autant par les
conditions politiques des années 1975-1980 que par le passé de la
famille. Le
récit dresse un tableau lucide de l'histoire des cent dernières années
de la Turquie qui pose adroitement une question très actuelle pour les
pays du Proche-Orient : l'occidentalisation a-t-elle échoué ? Quels en
ont été les résultats, quelle est la part de cette évolution dans les
conflits de générations comme dans les rapports droite-gauche en
politique ? Un beau roman. Un écrivain sensible, qui sait raconter une histoire.
excellentLe Livre noir[1995], 720 pages sous couv. ill., 108 × 178 mm, Paris, Gallimard, 1996, coll. "Folio" n°2897,Pendant une semaine, jour et nuit dans Istanbul, un jeune avocat, Galip, part à la recherche de sa femme Ruya, qu'il
aime depuis l'enfance, et qui lui a laissé une lettre
mystérieuse : est-ce un jeu ? un adieu ? Dans le fol espoir de la
retrouver, il fouille ses souvenirs et le passé militant de Ruya. Il lit
et relit les écrits de Djélâl, le demi-frère de sa femme - un
homme secret qu'il admire. Mais lui aussi semble avoir disparu. À la
recherche des deux êtres qu'il aime, Galip est en même temps en quête de
sa propre identité et, bientôt, de celle d'Istanbul, présentée ici sous
un aspect singulier : toujours enneigée, boueuse et ambiguë,
insaisissable.
excellentLe Château blanc[1996], trad. du turc par Münevver Andaç, 272 pages sous couv. ill., 108 × 178 mm. Paris, Gallimard, 1999, coll. "Folio",Le
narrateur est un Italien de vingt ans, féru d'astronomie et de
mathématiques. Capturé par des marins turcs et jeté dans la prison
d'Istanbul, il se dit médecin, et est offert comme esclave à un hodja,
un savant. Le maître oriental et l'esclave occidental se ressemblent de
manière effrayante, éprouvent une méfiance immédiate l'un pour l'autre.
Mais ils ne se séparent pas, vivent ensemble, travaillent ensemble,
quotidiennement, d'abord sur la pyrotechnie, ensuite sur une horloge,
enfin sur une redoutable machine de guerre pour Mehmet IV, dit le
Chasseur, sultan de 1648 à 1687. Ensemble encore, ils contribuent à
l'éradication d'une épidémie de peste. Tantôt dominant, tantôt dominé,
des années durant, chacun raconte sa vie à l'autre. Puis les deux
doubles doivent s'engager, avec leur machine de guerre, dans la
désastreuse campagne polonaise. Mise à l'essai sur un château blanc, la
machine ne fonctionne pas. Craignant pour sa vie, le Maître usurpe
l'identité, la personnalité et le passé du narrateur. Celui-ci reste à
Istanbul, devient le Maître. Des années plus tard, il entend parler de
l'Autre, comme d'un ancien esclave capturé par des marins turcs, et qui
s'est évadé...
excellentLa Vie nouvelle [1999], trad. du turc par Münevver Andaç, 448 pages sous couv. ill., 108 × 178 mm, Paris, Gallimard, 2000, coll."Folio", n°3428,«Un jour, j'ai lu un livre, et toute ma vie en a été changée.» Osman, le jeune narrateur de La vie nouvelle, est bouleversé par la lecture d'un livre mystérieux. Il est aussi amoureux de Djanan, qui comme lui cherche à comprendre les secrets du livre. Mais Djanan aime Mehmet, et
lorsque ce dernier et Djanan disparaissent tour à tour, Osman part à
leur recherche, comme à la quête de la vie nouvelle promise par
l'ouvrage qui l'obsède. Pendant
ses années d'errance à travers la Turquie profonde, seul ou avec
Djanan, le narrateur survit à plusieurs accidents de la route, découvre
le complot d'une organisation secrète opposée à tout produit occidental,
et s'interroge sur le sens caché des bandes dessinées de son enfance,
tout en restant animé du même amour fou et du même espoir. Jusqu'au jour
où il comprendra que ce monde nouveau tant désiré n'est peut-être rien
d'autre que la mort...
excellentMon nom est Rouge[2001], trad. du turc par Gilles Authier, 752 pages sous couv. ill., 108 × 178 mm, Paris, Gallimard, coll. "Folio", 2003, n° 3840,Istanbul,
en cet hiver 1591, est sous la neige. Mais un cadavre, le crâne
fracassé, nous parle depuis le puits où il a été jeté. Il connaît son
assassin, de même que les raisons du meurtre dont il a été victime : un
complot contre l'Empire ottoman, sa culture, ses traditions, et sa
peinture. Car les miniaturistes de l'atelier du Sultan, dont il faisait partie, sont chargés d'illustrer un livre à la manière italienne... Mon nom est Rouge, roman polyphonique et foisonnant, nous plonge dans l'univers fascinant de l'Empire ottoman de la fin du XVIe siècle,
et nous tient en haleine jusqu'à la dernière page par un extraordinaire
suspense. Une subtile réflexion sur la confrontation entre Occident et
Orient sous-tend cette trame policière, elle-même doublée d'une intrigue
amoureuse, dans un récit parfaitement maîtrisé. Un roman d'une force et
d'une qualité rares.
Istanbul, souvenirs d'une ville,[2003], trad. du turc par Jean-François Pérouse, Savas Demirel et Valérie Gay-Aksoy, Paris, Gallimard, [2007],Évocation d'une ville, roman de formation et réflexion sur la mélancolie, Istanbul est
tout cela à la fois. Au gré des pages, Orhan Pamuk se remémore ses
promenades d'enfant, à pied, en voiture ou en bateau, et nous entraîne à
travers ruelles en pente et jardins, sur les rives du Bosphore, devant
des villas décrépites, dessinant ainsi le portrait fascinant d'une
métropole en déclin. Ancienne
capitale d'un vaste empire, Istanbul se cherche une identité, entre
tradition et modernité, religion et laïcité, et les changements qui
altèrent son visage n'échappent pas au regard de l'écrivain, fin
connaisseur de son histoire, d'autant que ces transformations
accompagnent une autre déchirure, bien plus intime et douloureuse, celle
provoquée par la lente désagrégation de la famille Pamuk – une famille
dont les membres, grands-parents, oncles et tantes, ont tous vécus dans
le même immeuble – et par la dérive à la fois financière et affective de
ses parents. Dans
cette œuvre foisonnante, magistralement composée et richement
illustrée, Orhan Pamuk nous propose de remonter avec lui le temps de son
éducation sentimentale et, in fine, de lire le roman de la naissance d'un écrivain.
D'autres couleurs , Parution : 10-02-2011, Trad. du turc par Valérie Gay-Aksoy, 704 pages, D'autres couleurs nous
plonge dans l'univers intellectuel et culturel, mais aussi intime
d'Orhan Pamuk. Dans ces soixante-seize essais, discours ou récits, le
romancier turc nous parle de son enfance à Istanbul, de l'obtention de
son premier passeport ou de la mort de son père. Il se livre à une
brillante analyse de la politique turque au sens large et de la place de
la Turquie par rapport à l'Europe. Il se remémore également le
tremblement de terre d'Izmit en 1999, sa peur, et les catastrophes liées
au passage des pétroliers dans le Bosphore. Il rappelle l'importance de
Dostoïevski, de Camus, de Thomas Bernhard dans son parcours, puis
revient sur l'écriture de ses propres livres. Avant d'évoquer, au centre
de son discours de réception du prix Nobel, la figure de son père... Cet
ensemble de textes dessine un extraordinaire portrait d'Orhan Pamuk,
retraçant pour le lecteur le parcours d'un grand écrivain.
excellentNeige[2005], trad. du turc par Jean-François Pérouse, Paris, Gallimard. Le jeune poète turc Ka – de son vrai nom Kerim Alakusoglu – quitte son exil allemand pour se rendre à Kars, une
petite ville provinciale endormie d'Anatolie. Pour le compte d'un
journal d'Istanbul, il part enquêter sur plusieurs cas de suicide de
jeunes femmes portant le foulard. Mais Ka désire aussi retrouver la belle Ipek, ancienne camarade de faculté fraîchement divorcée de Muhtar, un islamiste candidat à la mairie de Kars. À
peine arrivé dans la ville de Kars, en pleine effervescence en raison
de l'approche d'élections à haut risque, il est l'objet de diverses
sollicitudes et se trouve piégé par son envie de plaire à tout le monde :
le chef de la police locale, la sœur d'Ipek, adepte du foulard,
l'islamiste radical Lazuli vivant dans la clandestinité, ou l'acteur
républicain Sunay, tous essaient de gagner la sympathie du poète et de
le rallier à leur cause. Mais Ka avance, comme dans un rêve, voyant tout
à travers le filtre de son inspiration poétique retrouvée, stimulée par
sa passion grandissante pour Ipek, et le voile de neige qui couvre la
ville. Jusqu'au soir où la représentation d'une pièce de théâtre
kémaliste dirigée contre les extrémistes islamistes se transforme en
putsch militaire et tourne au carnage. Neige est
un extraordinaire roman à suspense qui, tout en jouant habilement avec
des sujets d'ordre politique très contemporains – comme l'identité de la
société turque et la nature du fanatisme religieux –, surprend par ce
ton poétique et nostalgique qui, telle la neige, nimbe chaque page.
Le Musée de l'innocence, [2011], trad. du turc par Valérie Gay-Aksoy, Paris, Gallimard, Kemal,
un jeune homme d’une trentaine d’années, est promis à Sibel, issue
comme lui de la bonne bourgeoisie stambouliote, quand il rencontre
Füsun, une parente éloignée et plutôt pauvre. Il tombe fou amoureux de
la jeune fille, et sous prétexte de lui donner des cours de
mathématiques, la retrouve tous les jours dans l’appartement vide de sa
mère. En même temps, il est incapable de renoncer à sa liaison avec
Sibel. C’est
seulement quand Füsun disparaît, après les fiançailles entre Sibel et
Kemal célébrées en grande pompe, que ce dernier comprend à quel point il
l’aime. Kemal rend alors visite à sa famille et emporte une simple
réglette lui ayant appartenu : ce sera la première pièce du musée qu’il
consacrera à son amour disparu. Puis, il avoue tout à Sibel et rompt les
fiançailles. Quand,
quelque temps après, Kemal retrouve la trace de Füsun, mariée à son ami
d’enfance Feridun, son obsession pour la jeune femme montera encore
d’un cran… Le musée de l’innocence est un grand roman nostalgique sur l’amour, le désir et l’absence, une nouvelle preuve de l’immense talent de l’écrivain turc.
Cevdet Bey et ses fils,[2014], trad. du turc par Valérie Gay-Aksoy, Paris, Gallimard,
née le à Strasbourg de parents turcs, est une écrivaineturque. Femme écrivain primée et best-seller en Turquie, Şafak écrit ses romans aussi bien en turc qu'en anglais.
La critique note qu’elle mêle en permanence avec talent les traditions
romanesques occidentale et orientale, donnant naissance à une œuvre à la
fois « locale » et universelle. Féministe engagée, cosmopolite,
humaniste et profondément imprégnée par le soufisme et la culture
ottomane, Şafak défie ainsi par son écriture toute forme de bigoterie et
de xénophobie.
LU - La Bâtarde d'Istanbul, Paris, trad.(en) Aline Azoulay, préf. Amin Maalouf, Éditions Phébus, 2007, 319 p
L'architecte du sultan
Istanbul, XVIe siècle. Le jeune Jahan débarque dans cette ville inconnue
avec pour seul compagnon un magnifique éléphant blanc qu'il est chargé
d'offrir au sultan Soliman le Magnifique.
En chemin, il rencontrera des courtisans trompeurs et des faux amis, des
gitans, des dompteurs d'animaux ainsi que la belle et espiègle
Mihrimah. Il attirera bientôt l'attention de l'architecte royal, Sinan :
une rencontre fortuite qui va changer le cours de son existence.
Au coeur de l'Empire ottoman, quand Istanbul était le centre grouillant
de la civilisation, L'architecte du sultan est un conte magique où l'on
découvre le destin extraordinaire d'un garçon aux origines modestes qui
se verra élevé au plus haut rang de la cour.